mardi 30 juillet 2013

L’imposture du "libéral-conservatisme" (source: Contrepoints)

Auteur: Mathieu Bédard
Source. www.contrepoints.org
Mise en ligne: 30 juillet 2013 

L’expression "libéral-conservateur" gagne en popularité. Que se cache-t-il derrière ce mariage invraisemblable ?

 
Si le libéralisme "classique" est une philosophie politique dont découlent des positions telles que la propriété privée, l’opposition à l’impôt, et la régulation des entreprises par les phénomènes de marché plutôt que par l’intervention ex supra de l’État, elle défend aussi des idées comme la libre circulation des hommes, le libre-échange, la liberté d’expression, la liberté religieuse, la pluralité et la diversité, la responsabilité face à ses actes, la paix et la démocratie au sens du respect des droits individuels et de la limitation du pouvoir politique. Certains sous-groupes d’idées parmi celles-ci sont défendus par différents groupes politiques ; on peut en retrouver certains éléments présents sur tout le spectre politique. En revanche, aucun parti politique, ni aucune "position" sur l’axe politique, n’ont un programme entièrement libéral, et c’est en partie pourquoi il est impossible de répondre à la question "le libéralisme est-il de droite ou de gauche ?" 

Le conservatisme [1] lui, défend des idées de stabilité dans les valeurs considérées (à tort ou à raison) comme traditionnelles, et une certaine stase culturelle et religieuse, accompagnée d’un franc nationalisme ; des idées principalement défendues en France par l’extrême-droite. La façon dont sont généralement jumelés libéralisme et conservatisme varient. Tantôt elle limite le libéralisme à une doctrine économico-économique, et remplit les cases restantes avec le conservatisme, tantôt elle ne fait que parasiter le nom pour s’approprier une légitimité intellectuelle.

Si de plus en plus de gens se définissent comme "libéraux-conservateurs", la grande majorité sont en fait des conservateurs qui ont été éclairés sur l’absence totale d’une doctrine économique "de droite" et séduit par la cohérence et la justice du libéralisme économique, sans aller jusqu’à accepter ses applications allant au-delà des questions purement économiques. C’est ainsi qu’on voit énormément de "libéraux" autoproclamés défendre des idées allant contre le libre-échange, contre l’immigration, contre la pluralité et la diversité des points de vue et des styles de vie, et souvent se faire les chantres de thèses à la limite (ou au-delà) du racisme. Autant de points de vue et d’idées qui n’ont strictement rien à voir avec le libéralisme. Ce qu’il reste du libéralisme dans le "libéralisme-conservateur" ou le "conservatisme-libéral" ou autre n'est pas clair. Du point de vue libéral, les "libéraux-conservateurs" auraient probablement mieux fait de se trouver un terme équivalent au fiscally conservative des Américains, qui signifie plus ou moins être en faveur du marché, ou du moins opposé aux fiscalités excessives.

Pourquoi cet engouement pour le terme libéral alors ? En partie par parasitisme intellectuel ; le libéralisme jouit d’une légitimité intellectuelle et humaine reconnue et acclamée, à tel point que même les communistes contemporains ne peuvent prétendre ouvertement être contre les droits individuels, sous peine de se décrédibiliser complètement. En effet, qui au 21e siècle pourrait se dire contre la liberté ? Se réclamer d’une philosophie cohérente et complète est un atout indéniable pour une vision de la société qui est autrement inavouable et indéfendable. C’est l’équivalent du "je ne suis pas raciste mais" précédant une proposition raciste. Le terme libéral vient désextrêmiser le terme conservateur sans contraindre le conservateur à quoi que ce soit. Et ce, ironiquement, même si le terme libéral véhicule lui aussi, à tort, une consonance extrémiste en France.

Une autre explication pourrait être que les doctrines marginales attirent des marginaux. Le fait que le libéralisme soit constamment dénigré, caricaturé et calomnié en fait une pensée marginale, franchement incompatible avec la vision dominante naïve face au fonctionnement de l’État. L’idée est donc que les personnes elles-mêmes "marginales" sont naturellement prédisposées à être attirées vers les doctrines qui contredisent l’hégémonie intellectuelle. En revanche il serait faux de dire que les libéraux sont systématiquement des marginaux, la caractéristique dominante chez ceux-ci semble être d’avoir été séduit par la cohérence, l’humanisme et la justice que propose le libéralisme.

Une troisième explication est tout simplement que les libéraux ont mal expliqué leurs idées. Peut-être ont-ils trop insisté sur l’analyse économique, peut-être ne sont-ils pas allés aux fondements éthiques de ce qu’est le libéralisme. Peut-être est-il impossible de communiquer sur les fondements éthiques profonds du libéralisme tout en étant accessible et intéressant. Cela pose la question de savoir si le libéralisme est une philosophie trop intellectuelle là où beaucoup d’autres courants politiques cèdent plus facilement aux émotions et au populisme.

Si certains "véritables" libéraux versés dans l’action politique (et il reste à prouver qu’il y a de véritables libéraux dans l’action politique) souhaitent collaborer sur certains dossiers précis avec les éléments les plus fréquentables de la droite  (tout comme ils pourraient vouloir collaborer avec les éléments les plus fréquentables à gauche), ils feraient bien de reconnaître les incohérences et les incompatibilités qu’il y a entre les deux traditions intellectuelles. Négliger un socle de plusieurs siècles de pensée libérale affaiblirait notre légitimité et notre cohérence intellectuelle, nous marginaliserait, et entretiendrait les mauvaises idées qui circulent à propos du libéralisme.

Note :
[1] L'article traite du "conservatisme" tel qu'il est défendu et revendiqué aujourd'hui en France, et non tel qu'on peut le comprendre dans son acception philosophique, notamment au travers des auteurs anglo-saxons.

lundi 15 juillet 2013

Capitalisme et Liberté – Milton Friedman (1912-2006)

Chaque semaine, Contrario vous conseille une lecture libérale. Il s’agit ici de Capitalisme et Liberté par Milton Friedman (prix Nobel d’économie en 1976 et conseiller économique de Ronald Reagan)


Et si l'on retournait aux sources de l'économie classique pour penser et trouver des réponses à la situation économique actuelle ? Paru pour la première fois en 1962, Capitalisme et Liberté est l'un des ouvrages clés de la pensée économique. Écrit sans jargon, il est surtout le premier livre d'économie accessible à tous. Dans ce livre, Milton Friedman défend la liberté économique comme condition nécessaire à toute liberté politique. Il y présente sa propre vision du libéralisme et son analyse pointue est encore et toujours d'actualité. Cela fait de cet ouvrage l'un des livres incontournables du XXe siècle.




mardi 9 juillet 2013

France ou Suisse : quel est le meilleur modèle ? (Source: Contrepoints)

Auteur : Daniel J. Mitchell (traduction : Cthulhu)
Mise en ligne : 12 juillet 2013

La France ne devrait-elle pas revoir son modèle de société et s'inspirer de ses voisins helvétiques ?


Lors de la conférence de l’European Resource Bank (1) en juin 2013, Pierre Bessard de l'Institut Libéral (2) suisse évoquait lors d'un débat "le lien entre le poids de l’État et la prospérité économique". Sa présentation comprenait deux diapositives qui valent vraiment la peine d'être partagées.

La première, fondée sur des recherches du Boston Consulting Group (3), examinait quelles juridictions avaient le plus de ménages avec plus d'un million de dollars de biens. La Suisse est de loin le vainqueur et vous ne serez probablement pas surprise de voir Hong Kong et Singapour obtenir de bons scores.


Je me demande si les bons scores de la Suisse (4e), de Hong Kong (1er) et de Singapour (2e) sur l’index de liberté économique (4) du monde ont un lien avec leur prospérité ? Ceci est bien entendu une question rhétorique. La plupart des gens sensés comprennent déjà que les pays avec un marché libre et un Etat modeste (5) surpassent les nations avec de grands États providence et beaucoup d'interventionnisme.

En parlant de cela, regardons la diapositive de Pierre qui compare les finances publiques suisses avec les chiffres lamentables des pays de la zone Euro.

La partie la plus impressionnante de ces données est le moyen que la Suisse a utilisé pour maintenir un fardeau de dépenses publiques beaucoup plus faible. L'une des raisons des résultats supérieurs des Suisses est le "frein à l'endettement", un plafond des dépenses publiques (6) imposé par l'électeur et qui empêche les politiciens d'augmenter les dépenses plus vite que l'inflation et la population.

Maintenant, comparons la Suisse et la France, ce que j'ai fait au Free Market Show (7) organisé à Paris par Contrepoints (conférence « Après la faustérité » (8) du 15 juin 2013).
Dans le cadre de mon intervention, j'ai demandé à l'audience si elle pensait que son État qui consomme 57% du PIB lui donne de meilleurs services que l’État allemand qui consomme 45% de son PIB. Ils m'ont répondu non. Je leur ai demandé s'ils avaient un meilleur État que les citoyens du Canada, dont le gouvernement consomme 41% du PIB. Ils m'ont répondu non. Et j'ai conclu en leur demandant s'ils avaient un meilleur État que le peuple suisse dont le gouvernement ne consomme de 34% de la production économique (j'ai utilisé les données de l’OCDE (9) pour mes comparaisons, c'est pourquoi mes chiffres ne sont pas identiques à ceux de Pierre). Encore une fois, ils m'ont répondu non.

La question fondamentale est donc : pourquoi les politiciens français imposent-ils un fardeau si lourd de dépenses publiques (10) (avec un coût si élevé pour l'économie) lorsque les citoyens ne reçoivent pas de meilleurs services ? Ou peut-être la vraie question est-elle de savoir pourquoi les électeurs français élisent des politiciens qui poursuivent ces politiques insensées.

Mais pour être juste, nous devrions nous demander pourquoi les électeurs américains ont élu Bush et Obama, qui ont tous deux rapproché les Etats-Unis de la France (11).

Liens :
















La Moralité du Capitalisme. Ce que vos professeurs ne vous diront pas (divers auteurs - édité par Tom G. Palmer)

Chaque semaine, Contrario vous recommande un ouvrage de la grande bibliothèque du libéralisme.

Titre original: The Morality of Capitalism, What Your Professors Won’t Tell You. Traduit en français par Emmanuel Martin. Edité par Tom G. Palmer, Students For Liberty et Atlas Economic Research Foundation.



« Quelques mots s’imposent sur le titre « La moralité du capitalisme ». Les essais de ce livre portent sur la moralité du capitalisme, cependant, ils ne sont pas confinés à la philosophie morale abstraite, mais traitent aussi de l’économie, de la logique, de l’histoire, de la littérature ainsi que d’autres disciplines. Par ailleurs, ils portent sur la moralité du capitalisme, et pas seulement la moralité du libre échange. Le terme « capitalisme » se réfère non seulement aux marchés où sont échangés des biens et services et qui ont existé depuis des temps immémoriaux, mais au système d’innovation, de création de richesses, et de changement social qui a apporté à des milliards d’humains une prospérité qui était inimaginable pour les générations précédentes. » - Tom G. Palmer

En téléchargement légal et gratuit au bout de ce lien:

jeudi 4 juillet 2013

Un nouvel euro pour une nouvelle croissance. (Source: Les Echos)

Auteur : Pascal Dray (chef d’entreprise et docteur en économie)

Source : Le Cercle - Les Echos

Mise en ligne : 7 juillet 2013


Depuis sa création l’euro oscille entre "désastres économiques" et une "pseudo-monnaie". En effet, l’Euro n’est pas une monnaie, mais une construction monétaire risquée.


L’euro n’a jamais été une monnaie

L’euro n’a pas été conçu comme une monnaie. Il est encore aujourd’hui un panier de monnaies fiduciaires dont on a fixé des parités fixes entre elles. À l’origine, le taux adopté était arbitraire et reposait sur une vision keynésienne et constructiviste de l’économie. D’une façon générale et depuis toujours, l’économie ne repose pas sur un modèle constructiviste et planifié à l'avance, mais sur un ensemble d’actions humaines libres et intentionnelles concurrentes qui vise à optimiser l’allocation des ressources rares à des fins alternatives.

L’euro, dans ce cadre constructiviste, ne pouvait pas être une monnaie puisque toutes les monnaies ont toujours été le résultat de ces actions humaines. La monnaie est un intermédiaire des échanges utilisé initialement pour permettre aux coéchangistes de s’entendre sur un ratio entre les marchandises qu’ils s’échangent.

En effet, il est plus facile d’avoir un référentiel commun pour échanger que de trouver sans cesse les bonnes contreparties comme dans une économie de troc. La monnaie est censée faciliter les échanges. Puis lorsque le temps intervient, il est nécessaire que cette monnaie puisse préserver le pouvoir d’achat. C’est ainsi que progressivement les métaux précieux ont été sélectionnés par les individus comme monnaie. Au départ quand les souverains ont monopolisé la monnaie, elle représentait un poids d’or ou d’argent. Puis progressivement, des sujets zélés ont commencé à organiser la "spoliation monétaire légale", c'est-à-dire l’inflation.

Depuis le temps où nous n’utilisons plus de métaux comme référence monétaire, la monnaie n’a cessé d’être détruite pour arriver aux monnaies fiduciaires actuelles qui ne reposent plus sur des métaux précieux, mais sur le bon vouloir des autorités monétaires des grandes nations, à savoir les États-Unis, le Japon et le Royaume-Uni. Les trois monnaies de ces pays représentent les principales réserves de change de l’ensemble des autres pays. Or lorsque les autorités monétaires de ces pays impriment du papier, elles le font sans que cela représente quoi que ce soit. Et c’est ainsi que l’on a pu dire que le XXe siècle était le siècle de l’inflation, c'est-à-dire de la destruction monétaire.

L’euro a été construit pour être une nouvelle monnaie de réserve, mais c’était oublier que l’Europe est constituée de nations différentes avec des individus différents qui ne partagent pas les mêmes visions sur l’économie… Les Allemands sont sensibles à l’inflation, car elle a été une des causes de la montée du nazisme en Allemagne. Les Italiens, les Grecs, les Espagnols le sont moins. Au-delà du débat sur l’inflation, ces différents états se sont lancés dans une course à l’État providence depuis la Seconde Guerre mondiale. Ces éléments ont contribué à créer la mosaïque économique européenne que l’on connaît.

Les Allemands ont accepté de ne plus utiliser le mark pour utiliser l’euro à l’unique condition d’avoir un regard bienveillant sur la Banque Centrale Européenne. L’euro a été négocié à la suite de la réunification en 1989.   La négociation entre la France et l’Allemagne, ce fameux couple franco-allemand, n’a en fait reposé que sur le marchandage suivant : l’Allemagne adhère à l’euro, mais en contrepartie on laisse les deux Allemagnes se réunifier et on installe la Banque Centrale à Francfort.

Tous les protagonistes de la construction européenne connaissent ce marchandage. Or aujourd’hui nous sommes devant ce que les Allemands avaient redouté : l’euro est moins fort que le mark depuis le début de sa création. Les Allemands sont disciplinés, le reste de l’Europe l’est moins. Pour relancer l’activité économique, certains parlent d’austérité, les autres de croissance. Au-delà de ces débats sans fin, il faut tenter de sortir du schéma initial : le schéma keynésien.

Sortir du débat stérile "Croissance ou Austérité"

La plupart du temps une monnaie repose sur une Nation souveraine qui maîtrise les deux aspects actuels de la gestion politique de l’économie, à savoir la politique budgétaire et la politique monétaire. Nous avons vu dans trois articles précédents que cette vision de l’économie était erronée. Le keynésianisme ne reflète pas la réalité économique et c’est en partie pour cette raison que la crise s’éternise.

Le débat entre austérité et croissance est un faux débat qui reprend de toute façon les vieux outils rouillés du keynésianisme. Pour réellement sortir de la crise, il faut revenir à des outils économiques plus réalistes :
1) Partage consommation présente/consommation future.
2) Structure relative des prix des actifs et celui des dettes.

Par delà ces aspects techniques, il faut proposer aux Français et aux Européens une vision didactique, claire et précise de l’économie. Il est nécessaire que tous les citoyens comprennent les enjeux de cette crise et les mutations de la société qu’ils vivent au quotidien. On ne peut pas se contenter de dire qu’il existe une solution : il faut expliquer les mécanismes économiques, encore les expliquer, toujours les expliquer ! Il existe un grand nombre d’individus et de groupes d’individus au sein de la société civile qui peut parfaitement être le relais de ces explications.

Une fois cette clarification réalisée, si les individus font preuve de bon sens, il sera possible de déployer des solutions efficaces et réalistes au plus près des préoccupations de chacun. Il faut dédramatiser, poser des jalons réalistes, connecter l’ensemble des solutions et ensuite procéder à une grande clarification qui repartira sur des bases saines et solides.

Mettre les partisans d’un plan d’austérité en face de ceux d’un plan de croissance n’apportera rien et prolongera les effets négatifs de ces mutations, à savoir le chômage, la violence et la pauvreté.

Pour sortir de ce cercle vicieux keynésien, il nous faut proposer une clarification saine et réaliste : un nouvel euro.

Pour un nouvel euro

Un grand nombre d’individus ne comprendrait pas qu’on revienne à nos anciennes monnaies. Il est donc temps de convoquer une conférence monétaire qui sera dans un premier temps européenne. Lors de cette conférence seront posées les bases d’un nouvel euro.

Il faudra faire preuve de souplesse et de rapidité dans la création de cette nouvelle monnaie qui aura pour avantage de revenir à ses fondamentaux, à savoir un étalon et un pouvoir d’achat sans manipulation possible. L’objectif de cette "nouvelle politique monétaire" sera réellement de diminuer fortement l’inflation.

L’ensemble du système de prix relatifs pourra reposer sur des ratios marchandises/marchandises. On pourra connaître de manière saine et indifférenciée le pouvoir d’achat relatif réel de chaque bien et service et les échanges seront de  ce fait plus sains. La part de l’inflation dans les calculs monétaires redeviendra modeste. Le partage consommation présente/consommation future fera lui aussi référence à cette nouvelle base et sera par conséquent plus clair pour les investisseurs, les entrepreneurs et les consommateurs.

L’ensemble des acteurs de l’économie pourra à nouveau faire des plans à plus long terme et ceci favorisera la croissance et l’emploi. Car les investissements d’aujourd’hui sont les emplois d'aujourd'hui, mais aussi de demain. Tout le monde participera à cette nouvelle prospérité à la hauteur de ses moyens et de ses ambitions. Il est donc grand temps de passer à ce nouvel euro.

Ce nouvel euro pourra reposer sur des "marchandises", c'est-à-dire sur des métaux précieux par exemple. La parité sera définie par un poids d’or ou d’argent et la nouvelle monnaie sera convertible. Par exemple, on peut penser qu’il y aura des transferts d’or pour les transactions significatives et d’argent pour de plus petites transactions. Mais tant que les modalités ne sont pas définies, on ne peut que l’imaginer.

La création de ce nouvel euro pourra passer par une phase de transition où une parité sera définie entre l’ancien euro et le nouvel euro. La circulation des deux euros sera libre et les prix pourront être libellés en anciens euros ou en nouvel euro. Ceci n’est pas un problème, car nous voyons encore sur certains tickets des prix en francs et en euros.

Progressivement le nouvel euro, qui aura une référence avec une marchandise réelle, sera préféré à l’ancien euro, panier de monnaies inconvertibles. Il deviendra alors la monnaie des Européens qui auront adopté cette nouvelle monnaie. Car les Européens, par l’effort de communication effectué par les partisans de ce système, pourront par eux-mêmes se rendre compte de l’efficacité et de l’assainissement que l’adoption de cette monnaie provoquera.

Comme la référence à l’Or ou à l’Argent sera chose commune, les gouvernements devront s’adapter eux aussi et réaliser des budgets en accord avec cette nouvelle donne. L’équilibre des finances publiques ne sera plus une contrainte, mais une nécessité. La société civile prendra le relais de l’État là où celui-ci ne pourra plus apporter son concours. Cette solution devra être étudiée en toute connaissance de cause et pourra faire l’objet de conférences, dé débats, de formation, etc. .

Le nouvel euro sera une vraie monnaie, c'est-à-dire un intermédiaire des échanges stable et acceptable par tous dans les échanges. La monnaie redeviendra alors un pouvoir d’achat indifférencié, statut qu’elle n’aurait jamais dû perdre.

Source:

Billet d’humeur : Face au socialisme, les chiffres ne comptent pas. (Source: Contrepoints)

Auteur : Yul
Mise en ligne : 5 juillet 2013

Je voudrais dire à mes amis libéraux que si vous pensez que le sociétal est une diversion des socialistes afin de détourner l'attention de leur impuissance sur le plan économique, vous vous leurrez complètement. C'est que vous avez trop tendance à tout voir par le prisme économique. Les socialistes ne sont pas impuissants sur le plan économique, ils pourraient très bien remettre le pays sur les rails s'ils le voulaient. En faisant, par exemple, ce que vous préconisez. Ils sont à la tête de l’État, ils font les lois. C'est que si pour certains libéraux aujourd'hui, tout à tendance à relever de l'économie, pour eux tout est politique. Et même : social. Ce sont des socialistes... Il n'y a pour eux de problèmes que sociaux, et un problème social se règle à coup... de "sociétal" et en formatant les gens. Les problèmes économiques n'existent pas réellement à leurs yeux. Dans le meilleur des cas ils feront du keynésianisme, ils mentiront sur le nombre de chaussures produites comme dans ce célèbre passage de 1984, et parleront incessamment de l'emploi, parce que l'emploi, c'est social. Par économie, j’entends son sens usuel, limité, pas la praxis, ou même l’analyse de la politique en termes de marché ; deux pensées, l’école autrichienne et l’école du Public Choice, au demeurant très pertinentes.


Ce qui compte réellement aux yeux des idéologues socialistes, et il suffit d'entendre des ministres comme Peillon, Taubira, et Najat Vallaud-Belkacem, qui sont très clairs là-dessus, ce n'est pas remédier à la crise, qui pour eux est strictement un épisode extérieur, dépendant de l'activité aux États-Unis, et qui se résoudra d'elle-même, ce qui compte c'est "changer la civilisation". Donc des choses comme le mariage gay ne sont pas des diversions, et je pense que les socialistes planent suffisamment (group thinking) pour ne pas avoir envisagé la réaction que ça provoquerait. En même temps que le mariage gay, ils déploient en ce moment un enseignement de la sexualité très précoce à l'école (6 ans, Najat Vallaud-Belkacem parle de la maternelle), afin de lutter contre les préjugés "phobes", ainsi que d'un formatage visant à empêcher, d'un point de vue comportemental, les garçons et les filles d'être plus tard des garçons et des filles, afin d'obtenir l'égalité parfaite des sexes. Toujours cette obsession de l'égalité. Transmettre des connaissances ne les intéresse pas, on s'en était rendu compte avec la méthode globale et les délires pédagogistes. Ce qui les intéresse maintenant, c'est "déconstruire les stéréotypes". Toujours le sociétal. C'est le cœur de leur action. Les socialistes ne sont pas impuissants, ils ne font pas diversion, au contraire ils sont actifs.

Et les participants aux manifs pour tous, bien qu'étatistes, l'ont plutôt bien compris, contrairement à pas mal de libéraux qui passent pourtant beaucoup de leur temps à protester contre le totalitarisme. Il ne faut pas croire que les manifestants se moquent de l'économie au même titre que les socialistes : bien sûr, ils sont le produit de l'inculture française en la matière, qui est un choix du peuple presque dans son entier, et qui a tant favorisé le socialisme, lequel a su l'aggraver, mais ils sont jeunes dans leur majorité, et parmi eux on compte beaucoup de futurs cadres du privé et d'entrepreneurs. C'est juste la France non socialiste. La vieille France pas spécialement libérale, qui devait son développement économique au refus des politiques de s'occuper de quelque chose de mal élevé comme l'économie. Je crois que la question du mariage ou non des gays est un peu périphérique, c'est une opposition frontale à tout ce qui émane des socialistes sur le plan "sociétal". Au plan économique, l'action socialiste se caractérise surtout par une fiscalité écrasante et du dirigisme maladroit mâtiné de corruption et de com' – rien hélas qui ne sorte de l'ordinaire depuis des décennies.

Bien entendu, il y a aussi des enjeux de propagande et de clientélisme, car en plus d'être des idéologues, les socialistes sont aussi des crapules obsédées par leurs sinécures fastueuses et l'argent des autres. Mais il va falloir accepter que l'économie, ils s'en moquent, qu'elle n'existe pas vraiment à leurs yeux et qu'ils ne la voient qu'à travers le prisme du social (punir les riches, traiter le chômage par l'embauche publique, plus toutes les accusations délirantes). Aussi quand on s'oppose aux manipulations sociales des socialistes, on s'oppose frontalement à eux, on lutte contre le totalitarisme. La question de la dette, des réformes à engager, de la réforme de l’État aussi, ne sera sérieusement posée que lorsqu'il sera mis fin aux délires sociétaux. Et ce sera la crise, probablement, qui s'en chargera, en aggravant tout, pas l'injonction d'observer la dette, même si cette injonction est aussi formulée par la Cour des Comptes. N'estimez pas que l'on aura un débat sain tant que cette génération socialiste sera au pouvoir, y compris dans les médias et l'enseignement. Avec leurs bidouillages, les socialistes ont substitué le sociétal au véritable enjeu : la dette.

La question centrale, c'est un pays bouché, sans perspectives, où l'on cherche la soumission de la population en bidouillant ses cerveaux. La crise que traverse le pays sur le plan économique est une conséquence de la forme marxisante et clientéliste qu'a prise sa culture. Au final, la révolte prendra peut-être une tournure fiscale, comme il y a deux siècles, mais il ne faut pas oublier qu'à l'époque on ne s'est pas tant révolté contre le fisc et la dette – d'ailleurs le roi voulait qu'on parle en priorité de cette dernière aux États-généraux, plutôt que de questions de représentation – que contre le fait que le pays était bloqué, politiquement et socialement. Aujourd'hui, il l'est en plus culturellement. D’autre part, l’histoire du siècle dernier a démontré que non seulement les socialistes s’avèrent capables de se maintenir au pouvoir des décennies malgré une misère noire, mais comme l’a fait remarquer Margaret Thatcher, qu’ils savent exploiter la misère pour renforcer leur emprise, et donc (pour les autres) la recherchent en tant que telle… Au surplus, la dette, Lénine l’avait rayée d’un trait de plume. Pour libérer l'économie, il faut d'abord libérer la culture et politiquement, nettoyer les écuries d'Augias.

Le libéralisme doit aussi s'intéresser à la société et à la culture, aux institutions, à la politique, et mettre en avant sa vocation philosophique et morale fondée sur le droit naturel.

4th of July Independence Day: 9 graphiques pertinents relatifs à l’économie US.

Auteur : Thib13
Mise en ligne : 4 juillet 2013

En ce jour de fête nationale US, il est bon de jeter un oeil sur les graphiques suivants relatifs à l'économie américaine. 


La Federal Reserve (banque centrale américaine) fête son centenaire cette année et peut s’enorgueillir d’un bilan pour le moins gonflé dans tous le sens du terme. Je vous passe les véritables causes du Krach de 1929 et de la Grande Dépression qui s’en suivit mais j’invite néanmoins le lecteur à consulter Murray Rothbard à ce sujet dans America’s Great Depression. Depuis la fin des accords de Bretton Woods en 1973, de concert avec le gouvernement du même pays, mais en toute indépendance bien sûr, elle peut se permettre d’imprimer de la monnaie à qui-mieux-mieux tout en manipulant la courbe des taux sur toutes les échéances. Ci-dessous les Fed Funds Rates (taux de refinancement à court terme des banques privées). Source : Bloomberg.


Son action est omniprésente au point que le célèbre trader Rick Santelli en perd son américain et entre dans des colères noires (1) sur CNBC (« Il n’est pas écrit dans la Constitution que c’est le rôle de la Fed de fixer les taux d’intérêt ! »). Et pourtant, elle ne se gêne pas pour intervenir abondamment via son Fed Open Market Committee en achetant massivement des obligations américaines à en devenir le premier détenteur avec 1 923 milliards USD à ce jour, loin devant la Chine et le Japon (voir graphique ci-dessous).


Mais comment est-ce donc possible ? Eh bien, en faisant tourner la planche à billets et en emballant cela dans un jargon bien technique pompeux comme le « quantitative easing » (= assouplissement quantitatif). Le gouvernement US émet un emprunt, la Fed se positionne comme premier souscripteur achetant à n’importe quel prix, faisant ainsi baisser fortement le taux de rendement (disons, le coût de la dette pour le contribuable américain) et augmenter le prix des obligations Ceci entraîne une baisse du taux de rendement et donc du coût de la dette. Ci-après le taux de rendement de la dette US à 10 ans qui est passé de 4,25%/an à 2,47% sur 5 ans (même si on remarque bien que sa fourchette de fluctuation était entre 1,50% et 2,00% sur les 2 dernières années).   


Est-ce que cela a un impact sur les taux d’emprunt en USD des autres débiteurs dans le marché ? Bien sûr, le meilleur moyen de s’en rendre compte est de considérer l’évolution du taux swap de référence (10 ans contre US Libor 6 mois), le taux de référence dans les opérations d’échange du taux US fixe à 10 ans contre le taux variable à 6 mois sur le marché des produits dérivés. La chute est identique et cela se reflète dans les conditions d’accès au marché de l’emprunt en USD pour tous les autres débiteurs, leur prime de risque (risk premium) en plus évidemment (2).


Mais où trouve-t-elle l’argent ? Facile, elle le produit elle-même ex nihilo. La Fed écrit un chèque sur elle-même qu’elle remet au Trésor US qui ensuite le lui présente pour encaissement. Elle peut ensuite procéder à la création monétaire ad hoc (l’impression de billets est évidemment un processus informatisé de nos jours) et créditer le compte du trésor US en ses livres au final. Et l’affaire est dans le sac ! Ceci permet d’ailleurs au gouvernement américain de répéter l’opération de nombreuses fois et de propulser la dette totale à des niveaux stratosphériques (plus de 16 trillions de dollars, soit 16 000 000 000 000 USD). Ce n’est plus 9 mais 12 zéros dont on a besoin maintenant. Voici l’évolution de la dette US totale : +74,6% sur 5 ans.


Ceci entraîne aussi une projection du ratio dette/PIB (dette publique en pourcentage du produit intérieur brut) de 76% à près de 105% au 31/03/2013l. Traduisez par : « Vivons au-dessus de nos moyens. » source : Zerohedge.


Alors tout ceci n’impacte pas que le Trésor US et la dette américaine ? Non, ce n’est pas tout. La banque centrale balance aussi des mannes de cash vers les banques privées via la magie de la création monétaire. Ces liquidités sont ensuite démultipliées via le principe des réserves fractionnaires. A leur tour, Les banques privées créent de l’argent avec les nouveaux dépôts en ne provisionnant qu’une partie de leurs fonds propres. C’est d’ailleurs vers l’immobilier et les actions que les dollars affluent principalement. Malgré la crise des subprimes en 2008, nous n’avons toujours pas retenu la leçon et des taux abyssalement bas signifient des crédits pas chers et donc un investissement massif dans l’immobilier résidentiel, un secteur qui peinait à se remettre. Sur les 5 dernières années, l’indice Down Jones Wilshire US Residential ci-dessous a fait un bond de 230%.  


De leur côté, les actions ne sont pas en reste. Les valorisations des entreprises reposant principalement sur la méthode des cashflows actualisés, des taux bas signifient des valorisations et donc des cours-cibles super élevés. Et les cours de bourse doivent courir derrière pour rattraper leur retard, d’où une forte hausse des prix des actions US. Ci-après l’indice S&P500 qui a bondi de 138% sur 4 ans.


Et il y a encore de nombreuses classes d’actifs qui ont subi le même sort. Tout ceci crée une impression de richesse dans le chef des détenteurs de ces actifs.

Enfin, il ne faut pas oublier que la création monétaire engendre l’inflation et donc la hausse des prix en règle générale. L’inflation n’est pas la cause de cette hausse, c’est l’expansion monétaire qui en est à la source. Ci-dessous l’évolution des prix à la consommation en milieu urbain (+2,11%/an en moyenne sur près de 5 ans) aux USA sur les 5 dernières années. Et encore, je ne prends même pas la peine de discuter l’échantillonnage et le mode de calcul de cette statistique qui, comme tout le monde le sait, est sujette à des manipulations (comme le taux de chômage d’ailleurs).  


Outre le fait que la création monétaire tend à se répandre de manière égale dans la société, elle touche surtout les masses les plus pauvres et les plus faibles. L’euthanasie du rentier a également pour résultante une prise de risque accrue, un recours à l’emprunt de manière abusive et une mauvaise allocation des ressources dans des investissements qui, dans un environnement de taux normal soumis à la loi de l’offre et de la demande, seraient vite balayés ou ne verraient jamais le jour. La répartition inégale et progressive de l’inflation permet aussi à ses premiers receveurs (les banques privées et certains producteurs de matières premières par exemple) de bénéficier d’un effet d’aubaine puis aux suivants (les promoteurs immobiliers, les propriétaires de terrains à bâtir, les vendeurs de céréales…) dans des proportions moindres mais toujours bénéfiques. Au fur-et-à-mesure qu’elle se répand, elle finit par toucher les petits allocataires que sont les bas revenus comme les salariés en bas de l’échelle et les petits retraités qui, eux, n’ont rien vu venir et n’ont pas pu se couvrir contre cette inflation qu’ils ressentent douloureusement. Sous couvert d’aide à la relance, la création monétaire paupérise les plus pauvres et les plus faibles de notre société. Pis encore, elle permet, via la croissance du budget de l’Etat, d’embaucher une pléthore de bureaucrates qui auront pour but d’établir des règlements multiples et complexes, réduisant ainsi les échanges commerciaux et la production de biens et services. Enfin, la création monétaire et les manipulations de la courbe de taux d’intérêt par la banque centrale sont à l’origine de ces cycles économiques ponctués de crises (booms and busts = phases de croissance et de récession).

Notes :
(1) http://www.zerohedge.com/news/2013-06-19/rick-santelli-rages-what-bernanke-so-afraid 
(2) A noter que par convention le taux de rendement d’un tiers-débiteur US s’exprime en sus du taux « sans risque » représenté par l’emprunt souverain US sur la même échéance (ex. : Si l’emprunt à 10 ans de McDonald’s Corp affiche un taux de rendement de 3,3% par rapport au taux de rendement de 10Y US Treasury qui est à 2.5%, on parle d’une prime de risque de 0.8%.   

mercredi 3 juillet 2013

L'Ethique de la Production de Monnaie - Jorg Guido Hülsmann

Chaque semaine, Contrario vous recommande une lecture libérale. Il s'agit ici de l'Ethique de la Production de Monnaie par Jorg Guido Hülsmann, représentant de l'Ecole Autrichienne d'Economie. Traduit de l'anglais par Lucas Scrive-Félix. Editions l'Harmattan (juillet 2010).


Alors que la monnaie est omniprésente dans la vie moderne, sa production n'appelle, semble-t-il, aucune évaluation morale particulière. Ce manque concerne plus particulièrement les institutions monétaires modernes - les banques, les banques centrales et les monnaies immatérielles. Le présent ouvrage comble cette lacune par une synthèse entre l'économie politique de la monnaie, la philosophie réaliste et la théologie catholique.

Référence incontournable pour comprendre la crise économique actuelle et les questions morales qu'elle soulève, ce livre aborde, entre autres sujets, la compatibilité entre les préceptes moraux chrétiens et diverses constitutions monétaires ; les causes légales de l'inflation et les conséquences sur le plan de la spiritualité de l'inflation permanente ; les causes des crises monétaires et financières ; et l'utilité de la politique monétaire. La dernière partie de l'ouvrage esquisse l'histoire monétaire de l'Occident des trois derniers siècles. Il conclut par un plaidoyer pour la réforme monétaire.

lundi 1 juillet 2013

Les Verts n’aiment pas le gaz de schiste car ils n’aiment pas la prospérité (source et traduction: Contrepoints)

Auteur : Daniel Hannan est écrivain et journaliste, et eurodéputé Conservateur pour le Sud-Est de l'Angleterre depuis 1999. Il a gagné le Bastiat Award pour le meilleur journaliste en ligne. Son blog est hébergé par le Telegraph.

Traduction : Contrepoints


On pourrait penser que les verts se réjouiraient du trésor de gaz de schiste sous nos pieds. Voici un approvisionnement en énergie abondant, qui n'émet pas de suie (comme le charbon), qui ne bloque pas les estuaires (comme l'énergie marémotrice), qui n'affame pas les Africains (comme les bio carburants), et qui ne massacre pas des oiseaux rares (comme les champs d'éoliennes). Il n'a pas besoin de subventions publiques (comme les renouvelables et le nucléaire). Au contraire, il va générer un robuste flux de revenus fiscaux pour l'échiquier. Il va diminuer notre dépendance envers des régimes déplaisants, de Téhéran à Moscou, précisément le genre de régimes contre lesquels manifestent les verts. Oh, et il va faire baisser nos émissions de carbone en remplaçant le charbon dans notre production d'électricité.


Où est, donc, le problème ? Certains activistes parlent de pollution de l'eau. D'autres, de façon un peu fanfaronne, de tremblements de terre. Si l'un des deux était une possibilité le moins du monde sérieuse, on le saurait, à ce stade. Il y a déjà eu beaucoup de fracking aux États-Unis, et pas un seul cas de contamination de la nappe phréatique. Quant aux tremblements de terre, eh bien, oui, techniquement, tout tremblement est qualifié comme tremblement de terre, mais la sorte qui est provoquée par le fracking est, d'après le rapport (1) le plus exhaustif à ce jour, "à peu près la même que l'impact provoqué par la chute d'une bouteille de lait". Le procédé a été déclaré sûr par la Royal Society of Engineering et par la Royal Society.

Bien sûr, les gens sont prêts à croire le pire quand ils vivent dans les zones susceptibles d'être affectées. Et, on ne peut le nier, le fracking va causer certains dérangements au début, comme c'est le cas de tous les projets de construction. Il y aura des camions et des ouvriers, et de l'agitation générale. Ces choses, cependant, ne sont jamais aussi mauvaises que ne le clament leurs opposants. Tout comme, pour être juste, les emplois ne sont jamais aussi nombreux que ne le clament leurs supporters. Dans tous les cas, aussi bien les emplois que le dérangement seront provisoires. Les gains dépasseront les inconvénients par un facteur de 1000, et je dis ça en tant qu'eurodéputé pour une région qui sera probablement plus affectée que la plupart.

Les Unes du jour (le 28 juin) nous avertissent (2) du rationnement de l'électricité et de coupures de courant à grande échelle qui se préparent. Le fracking ne va pas juste résoudre ce problème, il va nous tirer jusqu'à un retour de la croissance, tout comme il l'a fait aux États-Unis. La découverte a eu lieu, par le jeu du hasard, au moment même où les réserves de pétrole, et plus particulièrement de gaz de la Mer du Nord s'épuisent. Et maintenant, il s'avère que nous sommes assis sur le plus grand butin de gaz de schiste d'Europe. Ça semble presque providentiel.

D'une façon très similaire, nos ancêtres, il y a longtemps, ont trouvé une manière d'accéder à des quantités presque illimitées de charbon, juste au moment où la Grande Bretagne entamait son expansion du XVIIIième Siècle. En conséquence, la révolution industrielle s'est produite ici, plutôt que, disons, en Chine ou en Italie. Nous sommes devenus la plus grande et la plus riche nation sur terre. Le charbon est la raison pour laquelle le monde parle Anglais.

Mais voilà la différence. Malgré les horribles dangers de l’exploitation du charbon au XVIIième Siècle -- l'effondrement des galeries, les inondations, les gaz explosifs -- l'industrie a été autorisée à se développer, et est graduellement devenue de plus en plus sûre et de plus en plus propre. Aujourd'hui, par contraste, une industrie plus propre et plus sûre que la plus propre des mines de charbon, est menacée par une coalition d'eurocrates envieux et de verts.

Je peux à peu près voir ce qui dérange les eurocrates. Ils n'aiment pas le capitalisme, et ils n'aiment pas les combustibles fossiles, et ils n'aiment pas la Grande-Bretagne. Les objections vertes sont plus dures à comprendre : nous avons là un approvisionnement en énergie propre, qui profitera à tout le monde, mais disproportionnellement plus aux moins riches, qui dépensent une plus grande part de leurs revenus en énergie. Quand j'ai pris la parole au parlement européen en soutien du fracking, la plupart des commentaires négatifs qu'on m'a opposés ne se sont pas concentrés sur des soucis particuliers de sécurité. Bien plutôt, ils se plaignaient en termes généraux que le fracking "empoisonnerait la planète", ou "saignerait notre mère, la Terre", sans cause plus élevée que l’appât du gain.

Ce qu'on entend ici par "appât du gain'" est le désir d'améliorer ses conditions matérielles, qui a poussé toutes nos avancées depuis l'âge de pierre. Quelqu'un voit une opportunité d'offrir un service pour lequel les autres seront prêts à payer et, en conséquence, de la richesse est créée, là où il n'y en avait pas auparavant. Ce qui s'est passé avec le charbon au XVIIIième siècle pourrait se reproduire maintenant : les prix vont chuter, la productivité va augmenter, les gens seront libérés pour de nouveaux emplois, élevant le niveau de vie pour tout le monde. "L’appât du gain", dans  ce sens, est pourquoi nous avons toujours des dents à l'âge de 30 ans, pourquoi les femmes ne s'attendent plus à mourir en accouchant, pourquoi nous avons du café et des ordinateurs et des cathédrales. "L’appât du gain" est pourquoi nous avons le temps d'écouter Beethoven, et de faire des promenades à la campagne, et de jouer avec nos enfants. Une énergie meilleur marché, quelle que soit la façon dont on le mesure, améliore notre qualité de vie.


Mais c'est précisément ce à quoi certains verts s'opposent. Ce qu'ils veulent, comme ils l'admettent franchement, est la décarbonisation, la désindustrialisation et la dépopulation. Ils voient les diverses avancées que nous avons connues depuis l'âge de pierre -le café, les ordinateurs, les cathédrales- avec regret. Ce dont la société a besoin, nous disent-ils, n'est pas du consumérisme vert, mais de moins de consumérisme. Ce qui, bien sûr, est ce que la plupart des pays occidentaux ont eu depuis 2008. Le krach nous a amené tout ce que les éco-guerriers exigent : un PIB plus bas, moins de consommation, un déclin du commerce international. Et cependant, étrangement, quand ça s'est produit, ils n'ont pas eu l'air satisfaits du tout. Il y a des gens qui ne sont jamais contents.

Liens :